Extrait de la vie d'un cavalier français - de l' ARIEGE à VERDUN et SALONIQUE
Je suis le petit-fils maternel de Pierre ROUCH, soldat français de la guerre 14-18.
De cette guerre il a très peu parlé.
Il avait été incorporé dans la cavalerie car, disait-il, lors de sa conscription, l'Armée a retenu son expérience des chevaux : il était issu de la campagne montagneuse du Couserans dans l' Ariège - France.
Bien qu'il n'ait jamais donné de détail il parlait seulement de Verdun pour ce qui concerne la partie de la guerre qu'il a vécu en métropole. Il avait évoqué des tirailleurs sénégalais dont il vantait le courage.
J'ai tout lieu de penser que c'est au titre de cette campagne qu'il avait obtenu la Croix de Guerre avec citation (voir photos et date).
Puis il avait été transféré à Salonique - Grèce sur le front des Balkans dont il parlait plus souvent. Je suppose que c'était dû au caractère exotique de cette affectation à une époque où on ne voyageait pas. En particulier il rapportait le climat rude qui y sévissait, le coté malsain de la région et les maladies qui s'abattaient sur ses compagnons. Il y avait contracté lui-même le paludisme, je l'ai toujours connu atteint de crises ...
Il était encore impressionné par la mise en oeuvre de ce que l'on appellerait aujourd'hui la logistique : fourmilière du port maritime, transports et débarquements par bateaux des troupes, des animaux et des marchandises, du stockage des denrées, du fourrage, des munitions, de l'armement...
Le transport local vers les postes avancés se faisait à dos de mulets par noria ...
Il évoquait une armée d'orient où il entretenait des rapports fraternels avec les soldats serbes je crois.
Il avait parlé de sa participation à la bataille pour une ville, je me souviens qu'il l'appelait Ousqube ou approchant, mais je ne suis pas sûr de l'ortographe. Il disait qu'ils avaient progressé avec leur chevaux pendant des jours dans la montagne et la neige, que la région était pauvre mais les habitants vraiment très accueillants. Il déplorait les difficultés de ravitaillement vers la ligne de front l'hiver. Des combats proprements dits il ne disait pratiquement rien et se fermait lorsqu'on insistait. Avec le recul j'imagine qu'il a vécu des expériences terribles.
Il avait combattu là-bas au-delà de l'armistice du 11 novembre 1918. Quoiqu'il en soit il est rentré en France en 1919.
Il possédait d'autres médailles que celle jointe dont une étrangère dédiée à ce front ou cette bataille. Je les avais vues lorsque j'étais enfant mais je ne les ai pas retrouvées après son décès, non plus que 2 étuis d'obus en cuivre ouvragé qui se trouvaient sur le manteau de sa cheminée. Je ne connais malheureusement pas l'origine de sa boite en faïence (voir photos) mais il y tenait beaucoup.
Etrangement, à la même période, mon grand-père paternel, que je n'ai jamais connu, combattait comme officier dans l'Armèe austro-hongroise contre l'Armée russe.
Mon père, né en 1903 dans la province de Galicie, me disait qu'enfant, pendant la guerre de 14/18, il se souvenait que sa ville natale (Stanislawow) avait changé de mains à de nombreuses reprises : Autrichiens, Russes, Polonais, Ukrainiens se succédaient les uns après les autres ... Il parlait d'ailleurs toutes ces langues : allemand (enseigné à l'école), polonais (parlé à la maison), russe et ukrainien (frontaliers ?).
Sa ville qui était austro-hongroise à sa naissance et pendant sa petite enfance est devenue polonaise à la fin de la grande guerre : né austro-hongrois il était devenu polonais. Pour l'anecdote, mon père m'a souvent rappelé qu'il avait vu l'Empereur François-Joseph lors d'une de ses tournées des provinces à l'occasion d'une visite officielle dans sa ville et à qui on avait présenté les écoliers méritants. Il se souvenait d'un vieux monsieur triste à favoris ...
Mon père a immigré en France dans les années 20. Aussitot naturalisé, en 1927, il a fait son service militaire dans l'Armée française pendant 5 ans à Colomb-Béchar dans le sud algérien ... Lors de la 2° guerre mondiale il a rejoint le maquis et la résistance dans les Hautes-Pyrénées près de Lannemezan/Tarbes... non loin de l'Ariège ! Mais ceci est une autre histoire...
De sorte que mes 2 grand-pères, en l'ignorant, appartenaient aux camps opposés en 14-18 ! Heureusement sur des fronts différents !
NOTA:
- Stanislawow s'est trouvée en URSS à l'issue de la 2° guerre mondiale et est aujourd'hui en Ukraine sous le nom de Ivano-Frankivsk,
- mon grand-père maternel en rentrant de la grande guerre s'était marié avec une voisine ariégeoise et avait travaillé quelque temps sur des chantiers de reconstruction dans la Marne où ma mère était née. Puis il s'était installé à Paris, avait fait des études d'ingénieur avant de faire carrière comme conducteur de métro à la RATP. A sa retraite il s'était retiré dans son Ariège natale où je l'ai connu.
3 photos de mon grand-père en uniforme de cavalier de l'Armée française en 14/18
2 photos de la Croix de Guerre de mon grand-père - 14/17
4 photos de la boite avec inscription MARNE - VERDUN de mon grand-père - 14/17
CONTRIBUTOR
Pierre Charles NACHT
DATE
-
LANGUAGE
fra
ITEMS
1
INSTITUTION
Europeana 1914-1918
PROGRESS
METADATA
Discover Similar Stories
FRAD077-056A | vie et mort d'un officier français
1 Item
Vie et mort du capitaine Jacques BONNAFONT, né à Paris le 13 décembre 1886, tué à Moussy (Aisne) le 17 avril 1917. || 1 portrait de Jacques BONNAFONT Lettre d'un de ses soldats et copie d'une lettre d'un autre de ses soldats Poème de Paul MURAT,sergent au 156e régiment d'infanterie Lettre de l'officier chef du bureau du renseignement à Mme BONNAFONT son épouse, le 29 mai 1917
FRAD077-056B | Vie et mort d'un aviateur français
1 Item
Coupure de presse (La Guerre aérienne illustrée N° 6 21 décembre 1916 page 95) de son nom d'artiste Edouard Touraine || Vie et Mort du Maréchal des Logis André BONNAFONT Officier au 12ème Dragons Pilote Aviateur à l'Escadrille M.F. 20
Parcours d'un fantassin et retour à la vie civile
1 Item
Jean-Baptiste Truffaut, fantassin, a accompli une période d'exercices au 132ème RI en septembre/octobre 1911. Son livret militaire fait état d'une blessure au bras gauche le 13 juin 1915 à Hébuterne (Pas-de-Calais), sans mention du régiment d'affectation. Il n'a pas laissé de courrier - il lui arrivait de chanter La chanson de Craonne, sans doute repensait-il alors aux années de guerre - mais il avait conservé : - le ruban d'insigne reçu à titre de blessé militaire (médaille non retrouvée), épinglé à sa croix de guerre - une citation à l'ordre de l'Infanterie signée le 29 juin 1918 par le Colonel Girardon commandant l'infanterie de la 162ème division,mentionnant sa présence au front depuis le début de la campagne. - un exemplaire des ordres généraux (n° 104 et 130) comportant ses nom et prénom et son affectation au 127 ème régiment d'infanterie 11ème compagnie entre le 29 mai et le 1er octobre (l'ordre n° 130 comporte au verso une carte de la zone d'action des unités de la 162ème division, dont le 127ème régiment. Démobilisé, il épouse en septembre 1920 une amie de sa soeur Clara : Virginie Huvenne, Veuve de Henri Lepoutre. M. Henri Lepoutre était décédé des suites de blessures de guerre le 8 octobre 1914 ; l'annonce officielle des circonstances de ce décès avait été faite à Mme Lepoutre, via le Maire de Roubaix, par courrier du 14 mai 1919 provenant du Dépôt des 87e et 287ème R. I.Deux enfants naissent. Rendu à la vie civile, J-Baptiste TRUFFAUT, qui a été gazé pendant les hostilités (selon sa fille, ma mère), devient éboueur à la Ville de Roubaix ; sa santé se détériore au milieu des années 30 et il en décède le 4 mai 1940... quelques jours avant la nouvelle invasion. || - page extraite du livret militaire, avec mention du coup de feu essuyé à Hébuterne et copie du ruban de l'insigne des blessés militaires - citation datée du 29 juin 1918 - exemplaire de l'ordre général n° 104 (pour la page verso notamment) - exemplaire de l'ordre général n° 130 (pour la page recto notamment) - photo du militaire et deux des ses camarades, prise durant la guerre (elle n'est pas datée, mais la mention du 127e apparaît sur le col du soldat assis) - lettre officielle annonçant à Mme Veuve Lepoutre les circonstances du décès de son 1er époux (l'unique enfant de cette 1ère union était décédée en 1906)


